lundi 17 octobre 2011

Arrivée au Gabon !


Alors voilà. Me voici à Libreville, capitale du Gabon ! Je suis arrivée il y a 15 jours déjà et j'ai été si occupée que je n'ai pas vu passer le temps. Alors je vais vous faire sans plus tarder, pour reprendre l'expression de mon amie Catherine, mon ''rapport d'étonnement'' !

Libreville
Concernant la ville, située dans un estuaire, j'ai eu le sentiment d'arriver d'abord dans un gros village, un gros village très peuplé. Mais cela reste raisonnable par rapport à d'autres capitales : il y a seulement 1,5 millions d'habitants au Gabon, dont la moitié dans la capitale. La ville est très étendue, car il n'y a que peu d'immeubles, tout est sur un ou deux niveaux maximum.

Mis part le centre ville et les quartiers résidentiels situés en bord de mer, quand on pénètre à l'intérieur de la ville, entre les routes goudronnées bordées de petites constructions en dur, on aperçoit beaucoup de constructions qui ressemblent à des bidonvilles, car tous les toits sont en tôle, avec ça et là des petits tas de détritus et un peu de verdure. Je ne me suis pas aventurée au coeur de ces quartiers en terre battue mais Francesco l'a fait avec un collègue vivant ici depuis longtemps, les gens étaient paisibles et accueillants.

Il faut quelques jours pour que l'oeil ne voie pas que les déchets qui jonchent les rues, et distingue des choses jolies, typiques : des petits tailleurs, des petits restos derrière des portes sans aucune pancarte...ou des choses étonnantes : j'ai vu aujourd'hui des dames très chic sortir de petites maisons en parpaings bruts, sans presque aucune fenêtre, et monter dans un gros 4x4 ! 


On est contents d'être à Libreville !

Les Gabonais

Concernant les gens et l'atmosphère, mes impressions ont été tout de suite positives et elles se confirment de jour en jour. Les Gabonais sont super gentils et accueillants.

Pour donner un exemple, plusieurs fois, quand on demandait notre chemin, les gens nous ont accompagnés ! Le plus fort est une jeune femme de ménage d'un centre commercial qui a posé son balai, a prévenu son responsable et m'a accompagnée pendant dix bonnes minutes pour m'amener à bon port ! On a papoté, elle était très cultivée, avait fait du bénévolat dans l'association où je souhaitais me rendre. Cela lui paraissait normal de m'accompagner.

Ce sont pour moi des surdoués du contact humain : ils savent toujours comment engager une conversation, et souvent après, la coutume veut qu'on échange son numéro de téléphone (tout le monde a un portable, c'est accessible) ; comme c'est un petite ville, on voit les mêmes gens.
Par exemple, une dame à qui on avait demandé notre chemin et qu'on a recroisée au même endroit par coïncidence (et parce que le centre ville de Libreville est petit!) m'a proposé de venir la voir à son travail au Ministère de la Santé pour me montrer une liste des ONG et associations.
J'ai aussi déjà rencontré le directeur d'une ONG (elles sont nombreuses), qu'on avait rencontré sur un marché, qui m'a exposé leurs nombreux projets pour ''filles mères'' comme on dit ici. Il ne m'a pas caché qu'il souhaitait ardemment que je fasse part de son association car un Blanc est vu comme une caution aux yeux des bailleurs de fonds : ''un Blanc ne va pas perdre son temps dans quelque chose qui n'est pas sérieux'', m'a-t-il dit.

''Éh les Sarkozy !''

Autre fait agréable : je ne suis jamais sentie mal à l'aise, même dans le marché le plus populaire, où en plusieurs heures, nous n'avons croisé aucun autre Blanc. Certains nous appelaient : ''Éh le Blanc, éh les Sarkozy !'' (- je n'aurais jamais imaginé même dans mes cauchemars les plus fous me faire appeler Sarkozy !!!!). Mais c'est toujours bon enfant, et peu fréquent. La plupart du temps, on ne nous regarde pas, les gens vaquent à leurs occupations. Ils ont l'habitude de voir des Blancs : les ressortissants français sont 12 000 au Gabon, sans compter les Blancs d'autres pays. Nous aurons un voisin ukrainien, ancien militaire travaillant à l'ONU (un homme à la carrure disons... rassurante !). Il y a aussi d'autres Européens, des Asiatiques, nous en avons vus au Centre Culturel Français où nous sommes déjà allés 4 fois en deux semaines car d'une part il y a une super programmation, et d'autre part, parce qu'a priori, il n'y a que cet endroit pour sortir ! Concert de flamenco, de rumba (semaine espagnole), un spectacle où les slameurs et slameuses disaient avec un langage très soutenu leur colère face aux corruptions et... leur amour de leur mère ! Si si, véridique ! La mère ici est quelque chose de sacré. Ça change des textes des slameurs français !

 Le bord de mer

On va s'installer dans un appartement au bord de la mer, près du lycée de Francesco. Il y a une chambre d'amis, avis aux amateurs! On est contents d'avoir trouvé car il y a peu de locations disponibles (les Gabonais déménageant peu, il y a peu de turn over). 

 Vue de notre futur appart 
(on voit pas sur la photo, mais il y a la mer derrière les cocotiers !)

Certains agents immobiliers disent que c'est pire à cause de la venue de nombreuses personnes pour la CAN (Coupe d'Afrique des Nations, pour ceux qui, comme moi, sont ignares de foot !), qui aura lieu ici même en janvier. La ville est en folie à cause de ça : il y a des travaux, les vendeurs ambulants ont disparu, les deux stades sont en construction, mais ne sont pas du tout finis (le béton sera-t-il sec ? that is the question...) et les lycées devraient même fermer!!

Le quartier où on loge en attendant s'appelle Montagne Sainte et est très animé, très sympa. Francesco voulait absolument y vivre, mais il n'y avait rien de disponible. Comme on est au 1er étage, on peut voir passer les gens, ce qui est spectacle en soi. Les femmes sont très élégantes et très féminines, habillées parfois à l'européenne, ou avec des boubous, ou encore comme des Falbalas, avec des vêtements taillés sur mesure, très ajustés. La coiffure est une institution : elles en changent souvent, et portent aussi des perruques (par cette chaleur, je ne sais pas comment elles font!).

Élégante Falbala

Produits et nourriture

Ce quartier est situé près du centre ville et du grand marché, Mont Bouët, où se trouvent des étals des fruits, légumes et autres biens, qui s'étendent dans un immense marché couvert et dans de nombreuses rues de façon tentaculaire. On a déjà une vendeuse attitrée, Anne (tous les Gabonais ont des prénoms français).''C'est ma copine !'', dit-elle de moi quand j'arrive. On rigole. En fait, tout le monde rigole facilement, et c'est bien agréable. Quand on achète pas mal, elle nous met deux tomates en cadeau (les légumes sont chers pour tout le monde, ils en mangent peu). 

Les femmes nous expliquent comment s'appellent ou se cuisinent certains fruits ou légumes, mais parfois on ne comprend pas : ''Alors, tu fais le foufou, et puis après...''. Donc on n'en est pas encore là, mais on espère apprendre (et alors on sera peut-être en guest star dans ton blog, Aude ?!). On retrouve dans tous les plats du poisson ou du poulet, aux petits oignons ou juste grillé, toujours accompagnés de riz, de manioc ou de bananes plantain frites, ou de pommes de terre frites (c'est riche quoi!). Tous les plats auxquels nous avons goûté (dans des bouis-bouis où je n'ai vu qu'un seul Blanc en quinze jours) sont délicieux ! Il y a aussi une forte influence de la cuisine sénégalaise (le célèbre thiep sénégalais, riz relevé aux épices avec poulet aux oignons confits, est pour l'instant mon plat préféré). 

Bananes plantain bouillies et poisson fumé sauce arachide (miam)
Riz et viande sauce tomate et haricots rouges (re-miam !)

À Mont Bouët,il y a aussi plein de boutiques de Libanais (qui ont le monopole de bien des commerces) qui vendent meubles et électro-ménager. On a acheté tout notre électroménager là-bas car les prix s'y négocient.
80 % des biens au Gabon sont importés !! Ce qui explique que tout est cher. Le moins cher c'est le poisson, pêché sur place, et le poulet. Beaucoup de légumes viennent du Cameroun ! Il n'y a que quelques fruits et quelques légumes qui viennent du Gabon.
La présence française est forte : un des plus grands centres commerciaux est un Géant Casino !! C'est super bizarre et on se sent vaguement schizophrène de se retrouver là-dedans, c'est exactement pareil qu'en France, avec juste les taxes en plus, ce qui donnent des sommes rondelettes ! On va donc limiter notre fréquentation et retourner deux fois par semaine à Mont Bouët faire notre marché.

Les Gabonais travaillent peu leur bois qui est magnifique, et est une des premières richesses du pays avec le pétrole. On a acheté aujourd'hui un lit dans le quartier des menuisiers ; le bois est splendide (il est rouge par endroits), mais à peine poncé (faire son lit peut se révéler dangereux à cause des échardes!), et pas laqué.
Les choses sont en train de changer, car le président a fait voter une loi à ce propos pour que le bois soit transformé sur place (avant il était exporté tel quel); mais la planification prévoyait un changement trop rapide : les usines ne sont pas encore prêtes, du coup le bois attend et s'abîme. Dans les magasins, dans ce domaine encore, pas de gamme accessible : c'est importé et hors de prix. Sinon, pour avoir de jolis meubles, il faut faire faire par un menuisier. Mais on est quand même contents de notre lit en bois rouge !

Les taxis
Il y a beaucoup de gens d'autres pays d'Afrique au Gabon. Par exemple, tous les taxis sont étrangers : Maliens, Sénégalais, Camerounais, Ivoiriens, etc. et quand on est tout seuls avec eux, et qu'on leur demande d'où ils viennent, ils nous racontent leur histoire. Quand ils parlent de leur pays, leur regard s'illumine ! 
 Vue de notre actuel appart provisoire (on peut voir deux taxis)

Les taxis collectifs (voitures en rouge et blanc), c'est tout une technique : il faut miser, c'est-à-dire annoncer un prix (on demande aux gens pour avoir une idée) et dire un lieu avec un grand repère, car il n'y a pas d'adresse (pour le courrier, ils utilisent des boîtes postales, -nous c'est celle de l'ambassade) : un magasin connu, une banque, une administration, le feu rouge ou la Station Total (une des compagnies françaises les plus importantes ainsi que Veolia...) de tel ou tel quartier... Le taxi repart si ça ne lui convient pas (pas son chemin, ou pas la bonne mise, il ne discute que rarement). Mais il en arrive un autre deux secondes après. Une fois, après m'être pris 4 ou 5 ''vents'', je me suis dit : ''Bon ben j'y vais à pied !'' Le seul souci, c'est qu'au bout de 10 minutes de marche, on est complètement en nage ! C'est pourquoi ici les gens sont très matinaux : ils se lèvent à 5h30, heure du lever du soleil, où il fait très bon.

Moustiques, clim' et climat

Il me faut maintenant parler des moustiques, qui demandent un peu d'organisation... Ces petites horreurs sont tenaces : elles n'en ont rien à faire du produit anti-moustique électrique français (mais ça serait peut-être pire sans?!) et leur piqûre ne gratte pas, elle fait mal ! Ça m'a déjà réveillée en pleine nuit. La bonne chose quand on a mal, enfin si on peut dire, c'est que ça signifie que ce n'est pas un moustique qui donne le palu (super !). Le répellant sur la peau est efficace par contre. Dans notre prochain appart, on va installer une moustiquaire sur notre lit (lieu du crime, car nous sommes alors d'immobiles victimes pour ces bêtes sanguinaires!) ce qui suppose de faire un trou au plafond. Les gens aisés en général ne s'embêtent pas : ils mettent la clim', chose que n'aiment pas ces infâmes bestioles.

Les gens qui sont aisés et bossent en bureau (ambition de beaucoup de Gabonais) vivent avec la clim' où qu'ils soient, appart et voiture y compris (si 75% des gens sont pauvres, les 25% restant se portent bien : il y a pléthore de 4x4 rutilantes), et la mettent généralement à fond. J'ai ainsi eu la chair de poule en faisant la queue à la compagnie d'électricité où j'ai attendu une heure, en vain faut-il le préciser : il me manquait de l'argent pour la caution pour ouvrir le compte (200.000 francs CFA, soit la bagatelle de 300 euros, que bien sûr je n'avais pas sur moi! On comprend que certains vivent sans électricité...).

Quant à nous, nous nous passons de la clim' (évidemment, Francesco et la clim', ça ne peut pas aller ensemble, j'ai donc choisi... Francesco !), mais avons acheté un ventilo (qu'on a eu la bêtise de déposer hier dans le nouvel appart, mais patience, on emménage dans 2 jours)... Il y a là-bas des moustiquaires au fenêtres, ça va permettre d'avoir de l'air. Ici c'est étouffant car nous fermons la baie vitrée à 18h, heure du coucher du soleil, heure fatidique où les moustiques rappliquent. Pour sortir, repellent sur les bras, jean et baskets obligatoires. S'il fait très chaud au soleil (même avec un parapluie en ombrelle, ça cogne), il fait très bon le soir et le matin. Ici les gens sortent peu le soir, je vais donc devenir du matin ! 


Comme tout est prêt pour notre emménagement de mardi, je vais pouvoir me concentrer sur mes recherches de boulot, en commençant par aller au Centre Culturel Français et au Lycée Français pour voir s'ils auraient besoin de mes services, en continuant à regarder du côté des ONG et ambassades. À suivre...

Sur ce, à plus !

mercredi 22 juin 2011

Faites-vous même votre malheur

Alors voilà. J'ouvre le deuxième épisode de la saga : ''Mieux vivre avec soi-même et les autres'', avec un ouvrage au titre inattendu j'en conviens : Faites-vous même votre malheur , le titre original étant plus rigolo encore si c'est possible : The Situation is hopeless but not serious. The Pursuit of unhapiness, soit : La situation est désespérée mais pas grave. La recherche du malheur.

Dans ce petit livre de 1983, Paul Watzlawick, (1921-2007) psychologue connu comme l'un des fondateurs de l'école de Palo Alto, nous dit TOUT sur ce qu'il faut faire pour se rendre immanquablement malheureux.
Ça demande un tout petit peu d'entraînement, mais vous allez voir, l'effet est tout à fait garanti et avec un peu de chance, vous reconnaîtrez des techniques que, comme Monsieur Jourdain, vous utilisez déjà sans le savoir !

Pourquoi est-il plus intéressant d'être malheureux que d'être malheureux?
Tout d'abord il semble évident qu'être heureux est affreusement vulgaire, banal, et provient d'un manque total d'imagination. Vous en connaissez des héros et héroïnes heureux, vous ? Nan ! Oedipe et Antigone heureux ? pouf pouf pouf ! Hamlet heureux ? ha ha ha! Madame Bovary ? hou hou ! Docteur Jivago, Inspecteur Moulin ? et j'en passe. Vous voyez bien que pour bénéficier de l'intérêt de la postérité et de vos proches, mieux vaut être malheureux, ça donne beaucoup plus de sujets de conversation.
Bon ça c'est moi qui le dit, je suis une littéraire que voulez-vous, on ne se refait pas.

Paul Watzlawick insiste lui sur le fait qu'au niveau sociétal, ce serait une catastrophe de rechercher le bonheur. Quid de tous les professionnels de la santé et de toute la chaîne de production de nos chers médocs ? Imaginez un peu l'économie du pays si on n'y avait moins recours : tous ces gens se retrouvant au chômage... ce serait bien pire que le trou de la Sécu ! Non, non, rechercher son malheur est vraiment louable, pour soi et pour la société.
Enfin, se rendre malheureux est un objectif qu'on peut atteindre avec beaucoup de facilité, on gagne à tous les coups ! Quelle satisfaction ! Et la lecture de ce petit livre pourra vous y aider grandement. Allez que diable (il vient à point nommé celui-là), un peu d'effort !

Loi 1 : ''Sois loyal envers toi-même, sans jamais renoncer''

Tout le monde sait que loyauté et persévérance sont des clés importantes dans la réussite. Eh bien, on ne croit pas si bien dire : cela peut permettre d'être vraiment très malheureux. Comment ? C'est très simple : en cas de conflit, il vous suffit de vous rappeler qu'il ne peut y avoir qu'un point de vue valide, et que ce point de vue est le vôtre ! Surtout il ne faut pas chercher ni à comprendre l'autre (il a TORT), ni de compromis (il faut être FIDELE à soi-même, sinon qu'est-ce qui nous reste ?).
Bref, l'idée est de ne surtout pas accepter le monde tel qu'il est, mais de s'attacher à ce qu'il devrait être.
Si quelqu'un nous conseille, surtout faire la sourde oreille, même si c'est la voix de notre propre raison.
Etre fidèle à soi-même est plus important.

Loi 2 : S'accrocher au passé

Cette loi-là est ma préférée : nostalgie, remords, rigidité, c'est le pied garanti, et pour longtemps : le passé, c'est la passé, il sera toujours là pour nous filer un coup de main, si d'aventure il nous arrivait aucun pépin !

a. Cultiver la nostalgie
Avantage radical de cette technique : cet intérêt pour le passé ne vous laissera guère de temps pour vous intéresser  à un présent susceptible de vous apporter des motifs de bonheur !
- Glorifier le passé : il suffit de se dire, c'était mieux avant. On gomme quelques aspects qui pourraient nous gêner (notre acné juvenile, les bagues dentaires, etc.) et hop, le tour est joué, votre jeunesse est devenu un paradis perdu, ''réservoir inépuisable de larmoyante nostalgie''.
- Idéaliser un amour perdu : c'est pour moi le number 1 au top 50 du malheur : même si la relation était un enfer, il suffit de se convaincre qu'en changeant quelques paramètres, ça aurait pu marcher (même si tout nous prouve le contraire). C'est logique : on est sans la personne, on en souffre, donc quel bonheur ça doit être de la retrouver ! Technique annexe : on peut se remettre avec quelqu'un qui lui ressemble, même s'il semble différent à première vue, ça marche aussi pour bien se rendre malheureux.

b. Avoir des remords éternels
Même si vous avez commis une faute mineure, le remords éternel est à votre portée : il suffit de vous le reprocher régulièrement : ''Le geste est fugitif, le repentir interminable''.
Encore mieux : reprochez-vous quelque chose dont à la base vous êtes totalement innocent ! Ainsi vous serez une innocente victime du destin, tels Adam et Eve chassés du paradis à cause de cette maudite pomme. Et là, c'est tout bénéf : comment s'opposer au destin ? on peut souffrir tout à loisir.

c. Etre rigide
Là, c'est un petit peu différent : le principe est d'utiliser une vieille recette pour un cas qui n'a plus rien à voir, et de se convaincre que si ça ne marche pas, ce n'est pas qu'il faut une autre solution (vu qu'il n'y en a qu'une, c'est bien connu), mais c'est qu'on a pas assez bien essayé (cf Loi 1), donc on persévère, et avec un peu de chance, on se crée ainsi une jolie névrose !

Loi 3 : Penser à des choses négatives les fait arriver

Si jamais on n'a pas eu de bol et qu'on a eu une enfance et une jeunesse heureuses, pas de panique : le futur recèle des réservoirs insoupçonnés de supplices qui peuvent se réaliser, c'est magique !
Il suffit de porter son attention sur des petites choses concernant votre corps : les chaussures qu'on porte, ou le calme dans lequel on se trouve. Très vite, vous allez ressentir que les chaussures sont trop serrées, et que des petits bruits, sifflements, vous percent les oreilles. Si vous le faites souvent, la sensation peut même s'accentuer, c'est magique.
Ensuite, faites attention au monde extérieur : observez comme les feux semblent passer au rouge quand vous vous en approchez, ou comme votre file au supermarché va plus lentement que toutes les autres, à chaque fois ! Ça y est, vous vous sentez maintenant poursuivi par une sombre malédiction qui vous est spécialement destinée.
Maintenant, observez avec soupçon une personne (sait-on jamais ce que veulent les gens ?), et vous allez vite voir que cette personne a effectivement l'air louche vu la façon dont elle vous regarde (qui n'est aucunement liée à la façon dont vous la regardez bien sûr). Ça y est, vous êtes devenue une victime de la malveillance d'autrui. Personne n'aime qu'on lui prête des intentions négatives, ça peut même rendre méchant.
Idem à l'échelle d'un pays : vous voulez une bonne gueguerre avec un pays voisin sans prendre la peine de l'agresser ? Il suffit de multiplier les mesures défensives, vous allez voir comment le pays voisin va réagir. Effet garanti.
''Nous avons la capacité de créer des situations tout en demeurant parfaitement inconscients de l'avoir fait... On a donc tout loisir de souffrir de ce fait sans retenue''.

Loi 4 : Avoir des conduites d'évitement perpétue la difficulté redoutée

Cette loi-là, elle est géniale, on pourrait la baptiser ''l'ironie du sort'' : c'est précisément en cherchant à éviter une situation ou une difficulté que l'on redoute, qu'on la perpétue !
La plupart du temps, ces dangers ou difficultés sont uniquement dans notre tête, mais ça serait dommage de s'en rendre compte en s'y confrontant.
Les dangers de la vie sont si nombreux, mieux vaut se calfeutrer chez soi. Ainsi, on est sûr que rien ne viendra contredire notre croyance. Bref, fastoche. Un exemple d'application réussie figure dans mon post sur les hikikomori, ces Japonais qui ont tout compris et ne sortent pas de chez eux. Il faut préciser qu'en plus, même chez soi, c'est pas gagné côté sécurité : il y a le risque sismique bien connu des Japonais, - la preuve il y a peu hélas, et il reste aussi des tas de saloperies dans l'air, dans la bouffe, etc. bref, on peut quand même trouver des motifs raisonnables d'inquiétude sans sortir de chez soi, je vous rassure !

Loi 5 : Croire aux prédictions de catastrophes les fait arriver

Ça peut être la prédiction d'autrui, ou la sienne perso, les deux marchent si elles sont bien négatives (cf Loi 3). Ici la spécificité est qu'il s'agit quasi d'un oracle. L'important c'est d'y croire.
Oedipe lui il s'est fait un mix de cette loi, plus la loi 4 et voilà ça a marché comme sur des roulettes : il a bien tué son père et couché avec sa mère en croyant tout faire pour l'éviter. Il serait resté tranquillou à côté de son papa et de sa maman adoptifs, en disant à l'oracle que tout ça c'était rien que des conneries, rien de tout ça ne serait arrivé, mais du coup on aurait été privé d'un grand mythe. Ben voui. Toute l'humanité y a gagné, le malheur ça a du bon.

Loi 6 : ''Gardez-vous d'arriver''

Faire des efforts inappropriés, c'est très bien pour se rendre malheureux (cf Loi 1), mais il ne faudrait pas faire des efforts adéquats et accomplir ses objectifs, là vous gâcheriez tout ! Plus le but est inaccessible, plus vous serez malheureux, donc réfléchissez-y avant de vous fixer des objectifs réalistes, et de cheminer vers eux pas à pas. Quelle médiocrité ! Recherchez l'absolu ! Vous ne le trouverez pas, ce qui vous occupera pour le reste de vos jours, et encore plus important, cela vous rendra infiniment malheureux.


Loi 7 : Faites de la vie d'autrui un enfer

Il suffit de lui envoyer des demandes contradictoires ou ambiguës :
'' Tu aimes ce plat que je t'ai préparé tendrement ?''
Il faut noter la subtilité : la demande porte sur le plat, mais elle porte aussi et surtout sur la relation (=tu as vu tout ce que je fais par amour pour toi ?). Si la personne n'aime pas ce plat et qu'elle répond non, elle est sans coeur. Si elle répond oui, elle ment !
L'idée est simple : quoique réponde l'autre, on l'attaque :
- Tu n'aimes pas ce plat ? avec tout le mal que je me suis donné (cela peut devenir votre expression favorite de martyre, cadeau !) ! gougeat !
- Tu dis que tu aimes, mais je vois bien que tu mens, tu as l'air dégoûté ! tu n'es pas digne de ma confiance !
Un conflit est inévitable, ou alors, pour l'éviter, la personne va manger de ce plat toute sa vie.
Quoiqu'il en soit, c'est gagné : la discorde est dans votre foyer.
''Sois spontané'' est un autre exemple d'injonction paradoxale (contradiction dans les demandes : l'ordre s'oppose à la spontanéité). Ou encore : ''Tu devrais aimer faire tes devoirs'' (on ne peut obliger quelqu'un à aimer, qui plus est ses devoirs !). Ou encore '' File dans ta chambre et ne reviens qu'avec le sourire'', comme si l'enfant pouvait se programmer ses sentiments. Même chose avec l'amour (comme obligation morale), le sommeil, le bonheur (sois heureux), etc. Tout cela ne souffre pas l'obligation. On peut tenter, on s'y cassera les dents.
Si c'est suffisamment répété, on peut rendre fou quelqu'un de la sorte.
La dépression consiste à se redire constamment qu'on a tout pour être heureux, et qu'on n'a pas le droit d'être malheureux, bref, on ajoute de la culpabilité par-dessus la programmation reçue pendant l'enfance qu'on continue de croire (l'auteur précise que cette formation initiale est obligatoire pour que la culpabilité fonctionne, désolée pour les candidats à ce grand trip du malheur !). D'où l'impuissance que peut ressentir l'entourage : plus on dit à la personne que ça va aller, qu'il y a des choses positives, plus elle est déprimée, car elle se sent encore plus coupable.
Se dire que les moments de tristesse font partie de la vie serait beaucoup trop simpliste, mieux vaut se dire qu'on est un bon à rien, pas doué pour le bonheur, c'est plus productif pour rester dans le malheur.

Loi 8 : ''Pourquoi m'aimerait-on ?'' 

Pour se rendre malheureux, rien de tel que de demander à l'autre pourquoi il vous aime.
Comme l'amour est par nature mystérieux, il sera bien en peine, et les raisons données paraîtront dérisoires. Encore plus fort, ne pas formuler la demande, mais se le demander, car il doit bien avoir une raison égoïste cachée.
Si vous vous êtes convaincus qu'on ne peut vous aimer pour vous-même, vous êtes prêts pour la technique dite de collusion (ou co-dépendance).

Vous voulez aider la personne que vous aimez, et c'est bien d'être altruiste comme chacun sait.  Mais en réalité, la collusion consiste à rechercher un partenaire qui confirme la façon dont on se voit nous-mêmes. Cela donne des couples du type l'altruiste et le loser (alcoolique, joueur, délinquant, etc.), et force est de constater qu'il faut effectivement beaucoup de soutien à ce dernier pour continuer à échouer de la sorte. Ils se complètent admirablement pour être malheureux : pour prouver l'immensité de son sacrifice, l'altruiste a besoin d'une personne assaillie de difficultés. Et pourquoi l'altuiste accepte-t-il de se sacrifier ? Mais pour recevoir une retribution en conséquence pardi ! Ce qui donne la belle injonction paradoxale sous-jacente (cf Loi 7) : ''Avec tout ce que j'endure pour toi, tu dois m'aimer.'' Or, qui peut aimer par devoir ? Personne. Donc on arrive à ce paradoxe apparent : on a moins de chance d'être aimé si on est toujours dans une relation d'aide.

Loi 9 : Je suis normal, les autres sont fous

Face à des comportements que nous jugeons étranges, inutile de chercher leurs fondements, il est plus simple de penser que nous sommes normaux, que notre comportement est adapté, en toutes circonstances, et que les autres sont dérangés, ou stupides.

Epilogue

Confiance et tolérance sont à bannir, ils risqueraient de mettre fin à tout ce jeu pour nous rendre malheureux, jeu qui est sans fin.

Pour finir, l'auteur cite Dostoïevski, in Les Possédés :
''Tout est bien, tout. L'homme est malheureux parce qu'il ne sait pas qu'il est heureux, ce n'est que cela. C'est tout, c'est tout. Quand on le découvre, on devient heureux, à l'instant-même.''
Et ajoute :
''Bref, la situation est désespérée et la solution désespérément simple.''

Sur ce, à plus !

samedi 4 juin 2011

Heureux qui communique, de Jacques Salomé

Alors voilà. Je vais essayer de rendre compte de ce que j'ai appris cette année grâce à la formation que j'ai suivie, et aux livres que j'ai lus,  sur les mécanismes de la pensée (nos croyances, nos savoirs, etc. ) pour mieux vivre avec soi-même et les autres (rien que ça !).

Je commence par le plus facile : ma lecture de ce petit bouquin, très facile à lire comme tous les livres de Jacques Salomé : Heureux qui communique, qui n'est pas de première fraîcheur puisqu'il date de 1993, mais ce n'est pas important, car ce qu'il dit dans ce bouquin, c'est le B-A BA de la communication, -ce qui ne veut pas dire que cela soit facile à appliquer, car cela va à l'encontre de pas mal d'habitudes. Je l'ai lu en octobre dernier, mais j'ai eu la bonne idée de prendre des notes, et l'auteur a eu la non moins bonne idée de structurer son livre en grands chapitres, ce qui aide !

1. Je et non tu
Eviter les ''tu devrais'' (normatifs), les tu, tu, tu!
Selon sa formule (je crois bien que c'est de lui), c'est le tu qui tue !
Dire ''je'' : il s'agit de parler de ce que moi je fais, je ressens, je projette, et inviter l'autre à se situer à parler de lui, à se positionner (ne pas oublier cette seconde partie, car si on la laisse implicite, - toujours dangereux l'implicite, l'autre va nous prendre pour un sacré égoïste !)

2. Parler à autrui
Je ne parle pas sur l'autre, mais à l'autre.
On évite les comparaisons : moi à ta place (très dur de s'en passer de mon point de vue, j'ai le sentiment de faire de la non-assistance à personne en danger ! mais quand la personne ne demande rien, explicitement ou implicitement, elle ne demande qu'à être écoutée ! ou alors, si on a un doute, on peut demander : Est-ce que tu veux connaître mon avis ?)
Accueillir la parole de l'autre, sans se l'approprier, dans la rejeter.

3. Responsabilité
Je suis responsable de ce que je fais, de ce que je dis.
Je n'endosse pas la responsabilité de comment l'autre le perçoit.
Par contre j'invite l'autre à faire quelque chose par rapport à sa perception (inquiétude, colère, etc.) si j'ai besoin de son soutien.

4. Pratiquer la confirmation de l'autre
Confirmer l'autre, ce n'est pas l'approuver. C'est reconnaître son ressenti.
Aucun ressenti ne peut être nié : on peut trouver une réaction disproportionnée, mais cela appartient à la personne qui le ressent.
Plutôt pratiquer l'introspection quand ce ressenti nous trouble.

5. Accompagner les émotions
Il est difficile pour nous d'accepter d'entendre des émotions.
Que faire ?
- se taire
- être proche
- toucher peut-être
- inviter à mettre des mots sur ce que la personne vit au présent (pas au passé)
- confirmer l'autre, partager : c'est comme ça que tu as vécu cet événement, on peut le faire avec de la tristesse, de la colère.
- pas d'accusations
- pas d'autoaccusation

6. Cultiver les relations importantes
- renoncer aux plaintes, reproches (très, très dur de mon point de vue, mais fondamental),
-oser formuler des demandes, énoncer ses possibles, ses limites, proposer des projets
-ne pas anticiper sur la réponses
- confirmer les réponses de l'autre sans se les approprier

7. Ne pas se laisser polluer
- je laisse chez l'autre ce qui ne me va pas
- je ne laisse pas ma rancoeur s'installer, j'en parle : je souhaite te dire comment j'ai reçu ceci (évidemment, on va le dire avec nos propres mots, sinon, ça fait secte ou illuminé du Larzac !)

8. Ne pas entrer dans les jugements de valeur
Je refuse les disqualifications, l'accusation, le chantage, les culpabilisations de l'autre sur moi
Je renonce à l'approbation (ben voui :()
J'ose m'affirmer (bon, là, il me faut pas toute une vie, mais bon, de la pratique, beaucoup de pratique !).

9. Différencier sentiments et relation
On peut aimer quelqu'un et ne pas aimer telle ou telle chose qu'il fait, ou dit.

10. Différencier besoins et désirs

La fonction essentielle des parents est de répondre directement ou indirectement aux besoins des enfants, et d'entendre leurs désirs.
- il faut leur apprendre à distinguer un besoin d'un désir,
- possibilité d'en faire un projet,
- ne pas y répondre automatiquement,
- possibilité de le garder à l'état de désir,
- ou alors, on doit dire : Non, je ne le trouve pas sûr pour toi, mais dangereux. Te trouves-tu prêt pour cela ?

11. Je renonce à imposer mes certitudes (ça y en a être très très dur pour petit Scarabée qui croit avoir découvert la lune...)
- je ne suis pas à la place de l'autre,
- autonomie, maturité = la façon dont on compose avec ses propres demandes, indépendamment de la réponse ou de l'attente de l'autre.
- adolescents : il s'agit de passer des soins et des exigences, à un échange,
- se différencier pour partager ! nous sommes différents, nous n'avons pas les mêmes goûts. Ben voui, bienheureux mon neveu !

Voilà, maintenant, y a plus qu'à laisser sédimenter. S'en nourrir, l'oublier, et s'en servir, à bon escient. Car être toujours comme ça, vous imaginez l'ennui que ça serait ! :)
A plus !

jeudi 31 mars 2011

2011, année du Lapin radioactif


- Radioactif, moi ?! (Pan-Pan, lapin ardennais)

Alors voilà. On peut dire que je n'ai pas été productive bloguement parlant ces six derniers mois. C'est pas de ma faute, je retravaille pour de vrai ! Alors ça fatigue, fatalement.

J'espère que vous allez bien.

Parce que je pense que vous l'aurez remarqué, autour de nous, c'est la cata. Cata de chez cata. Tout qui pète.  Dans les pays arabes, ça pète, partout où il y a des dictateurs, et y a de quoi faire, ça gronde. Khadafi veut faire la peau à son peuple décidément trop ingrat pour son bienfaiteur. Le Japon guette la catastrophe nucléaire, par-dessus un tsunami. Bref, 2011, c'est pas du gâteau pour le moment.

Et en France, c'est la sinistrôse qui continue, de tsunami point, on continue notre ronron morbide. Pour les cantonales, on nous ressert les guéguerres de la gauche, de la droite, toujours les mêmes hommes et femmes politiques, dont la seule chose qui fait débat c'est s'ils vont être élus. Mais personne ne songe à nous dire élus POUR QUOI FAIRE. Leurs marionnettes deviendront bientôt plus réelles que tous ces fantoches qui jouent aux mêmes chaises musicales, dans le même salon de l'Elysée, depuis 20 ou 30 ans. On appelle ça la politique. Je vois pas la différence avec l'Ancien Régime. Si, peut-être les coiffures. Et on voudrait que les gens votent ? mais pour qui ? Pour langue de bois n.1 ou n.2 ? Je ne vois que des egos qui parlent, rien qui sorte des tripes. Ils doivent être trop exposés pour réfléchir encore, pour ressentir encore.

Le seul que j'aimais bien, c'était Martin Hirsch.  Lui, pas fou, avait un projet bien précis en tête : il a mis en place le Service civique, et il a dit ciao au gouvernement ! J'étais là pour l'inauguration du Service Civique au théâtre du Rond Point l'an passé, il y avait entre autres Stéphane Hessel, qui avait la pêche ! Il a fait depuis un tabac avec son petit livre très bien mis en valeur dans les librairies : ''Indignez-vous'' ! Chez nous, il faut que ce soit un papy de 90 ans passés qui a fait de la Résistance qui incite les gens à s'indigner ! Il est très bien ce petit livre, mais il ne dit pas comment grouper nos indignations et en faire une force politique.

Si vous avez une idée, allez-y, faites-en profiter tout le monde. On a Facebook, on peut créer un groupe d'agitateurs de pensées webo-actives ! Profitons-on tant qu'on a la liberté de parole, on sait pas combien de temps ça va durer...


Sur ce, à plus !